LE COEFFICIENT BALISTIQUE
Précieux pour bien maîtriser le tir à longue distance,
le coefficient balistique demeure souvent mal connu des chasseurs.
Texte de Francis Grange
Le coefficient balistique d’une balle caractérise sa pénétration dans l’air, donc sa capacité à conserver sa vitesse et en conséquence son énergie (qui conditionne son efficacité à l’impact), à être peu sensible au vent latéral, et à disposer d’une trajectoire « tendue » limitant les corrections de visée en hauteur. Le coefficient balistique concerne ainsi essentiellement les chasseurs pratiquant de longues portées, c’est-à-dire ceux opérant en haute montagne ou en chasse silencieuse en terrain découvert. Mais il constitue alors pour eux une donnée essentielle à la parfaite maîtrise de leur visée.
Bien le comprendre
Le coefficient balistique fluctue entre 0 et 1. Plus il est élevé, mieux la balle préserve sa vitesse et moins elle se trouve déviée par un vent latéral (ou par la composante latérale de ce vent). Le coefficient balistique dépend essentiellement du profil de la balle et de sa densité de section. Plus l’ogive est fuselée, avec une pointe effilée et un arrière rétreint « boat tail » (en forme de queue de bateau), mieux elle pénètre dans l’air et donc plus son coefficient balistique s’élève. De même, plus la balle s’avère lourde relativement à son diamètre, plus sa densité de section est importante et son coefficient balistique à l’identique. Ainsi, contrairement à ce qu’imaginent souvent les chasseurs pratiquant de longues portées, la recherche du projectile le plus rapide possible ne constitue pas la meilleure approche. Cette haute vélocité ne peut en effet s’obtenir qu’en recourant à une ogive très légère, alors handicapée par sa densité de section limitée. Mieux vaut optimiser le couple poids / vitesse initiale avec des masses de balles médianes par rapport au calibre, soit de 9,7 g en 7 mm, 11,7 g en 7,5 mm ou en 30/300, et 12,7 g en 8 mm, ou légèrement moins. Subsidiairement, le coefficient balistique d’une ogive peut encore se peaufiner par l’insertion à son avant d’une pointe en polymère et le nickelage de son blindage qui favorisent son glissement dans l’air.
Sa détermination
Le coefficient balistique s’obtient en mesurant le freinage du projectile dans l’air, par une température de 21°, un taux d’humidité de 60 %, une pression atmosphérique de 1013 millibars et un vent nul. Ces conditions théoriques n’étant jamais exactement remplies, le coefficient balistique d’une balle peut légèrement varier d’une table balistique à une autre, mais néanmoins dans une fourchette tout à fait resserrée. Sachons qu’un coefficient balistique dépassant 0,450 s’avère excellent, et entre 0,400 et 0,450 encore très favorable. A l’opposé, entre 0,300 et 0,350 il est préférable de réserver la balle à la chasse silencieuse en terrain couvert ou à la battue, et au-dessous de 0,300 uniquement à cette dernière…
La conservation de la vitesse
Une ogive dotée d’un coefficient de 0,500 propulsée à 900 m/s garde une vélocité de 835 m/s à 100 m et de 773 m/s à 200 m, alors qu’une balle affectée d’un coefficient de seulement 0,250 lancée à la même vitesse ne dispose plus que d’une vélocité de 780 m/s à 100 m et de 663 m/s à 200 m. Le second projectile affiche, comparativement au premier, un handicap d’énergie cinétique résiduelle de 13 % à 100 m et de 26 % à 200 m. Quant à leur DRO (distance de réglage optimale), qui traduit la tension de leur trajectoire, elle s’établit respectivement à 191 m et 172 m.
La sensibilité au vent
Bien qu’empirique, la formule permettant d’évaluer la déviation d’un projectile sous l’action du vent s’avère totalement fiable. Il s’agit de . Où est la déviation due au vent en m, la vitesse de la composante latérale du vent en m/s (qui s’obtient en multipliant la vitesse du vent en m/s par le sinus de l’angle que forme son axe avec la trajectoire de la balle selon la formule ), d la distance de tir en m, la vitesse initiale de la balle en m/s et sa vitesse résiduelle en m/s. Un vent soufflant à 40 km/h (11,1 m/s) avec un angle de 60° par rapport à la trajectoire de l’ogive équivaut ainsi à un vent soufflant perpendiculairement à cette trajectoire à 11,1 x sin 60° = 11,1 x 0,866 = 9,6 m/s, soit à 35 km/h. Une balle lancée à 900 m/s et dotée d’un coefficient balistique de 0,500, dont la vitesse résiduelle à 200 m est de 773 m/s, dévie à cette distance de , soit 16 cm. Alors qu’une ogive propulsée à la même vélocité mais dotée d’un coefficient tout à fait médiocre de 0,250 induisant une vitesse de seulement 663 m/s à 200 m est balayée de , soit 32 cm… le double !